Feuerstein le pédagogue explore l'intelligence sans limites pour tous 

9 JANVIER 2025 - Reuven Feuerstein, c’est d’abord une histoire de vie peu banale. Né en 1921 en Roumanie, de parents juifs, il poursuit des études à l’école des enseignants de Bucarest, embrasse cette profession et devient, très jeune, directeur d’une école pour enfants présentant des difficultés d’apprentissage.

En 1941, la Roumanie est envahie par les nazis, Reuven étudie la psychologie dès 1942 à l’université de Onesco à Bucarest. En 1944, alors que la chasse au juif bat son plein, il émigre en Palestine. Il reprend des études de pédagogie à Jérusalem, animé par un besoin d’approfondir ses connaissances. En 1945, il enseigne dans un centre accueillant des immigrés, des réfugiés, et des enfants juifs et arabes présentant des difficultés d’apprentissage. Cette expérience de trois ans sera formatrice.

Après la seconde guerre mondiale, il repart étudier à Genève et fort des leçons tirées auprès des jeunes du Youth Aliyah village en Palestine, il commence à théoriser une méthode fondée d’abord sur une conception de l’intelligence, «toute personne est capable de changement, quels que soient son âge, son handicap et la gravité de ce handicap. Les enfants différents ont simplement besoin d’un surcroît d’attention et d’investissement personnel.»   Ses travaux  trouveront une reconnaissance académique à travers une thèse de doctorat soutenue à la Sorbonne, un travail de 7 ans, en 1970 alors qu’il est âgé de 49 ans.

Cet éternel étudiant met en pratique sa conception fondamentale, entérinée plus tard par les neurosciences et la théorie de la plasticité cérébrale : l’intelligence, contrairement à ce que diffusent les tests de Q.I. n’est pas une mesure figée. Elle peut être améliorée à tout âge, quelque soit l’origine sociale, le niveau initial d’études et même les handicaps cognitifs. Il affirme avoir fait progresser ses élèves de Aliyah.

Le deuxième concept essentiel élaboré par Feuerstein est celui de la médiation. »Le médiateur est la personne qui s’interpose entre l’enfant et le monde, qui interprète pour l’enfant ses expériences, qui réordonne, organise, regroupe, structure les stimuli auxquels l’enfant est exposé, en les orientant vers un objectif donné. Et c’est cette médiation qui crée chez l’enfant la disposition à apprendre. » (Ch. Mayer, 8e Biennale de l’éducation et de la formation, Texte publié par l’INRP, Paris, 2006).

«L’attitude traditionnelle est de dire : un enfant trisomique est retardé parce qu’il a trois chromosomes au lieu de deux, explique Rafi Feuerstein, fils de Reuven Feuerstein et vice directeur de l’institut. Nous, nous disons : sa trisomie crée une situation qui bloque le passage de la médiation – d’où son retard. Notre rôle est de trouver les interstices dans la muraille et d’y faire pénétrer la médiation, qui entraînera le changement. »

LE PROGRAMME PEI 

Reuven Feuerstein développe sa méthode dès les années 50, peaufinée au fil des années. Deux applications pratiques sont élaborées :  la méthode d’évaluation dynamique du potentiel d’apprentissage et le programme d’enrichissement instrumental (PEI). Ces outils pédagogiques fonctionnent sur un principe commun : il s’agit de valoriser l’enfant au maximum en évitant toujours de le mettre en échec. (pour en savoir plus sur ces outils, lire ).

Feuerstein a mis en place un centre d’enseignement qui, selon le site de l’institut, opére dans 40 pays et ce à divers niveaux,  pour enfants scolarisés dès 9  ans au début, puis en pré scolaire, pour enfants présentant un handicap, puis en remédiation pour des adultes (dans l’armée, dans l’industrie, formation, réorientation, réinsertion. )